L'espérance
Rédigé par yalla castel - - Aucun commentaire![](https://yallahcastel.fr/Blog/data/medias/esperance.jpeg)
"Les larmes sont la pluie de l'âme. Elles lavent toutes les crasses. "
Henri Gougaud
Henri Gougaud, né en 1936 à Carcassonne, est un écrivain, un poète, un conteur et un chanteur français mais aussi occitan. Né d'un père cheminot et d'une mère institutrice, Henri Gougaud prépare une licence de lettres à Toulouse. En 1962, il monte à Paris, au bout de six mois il est engagé à La Colombe où il chante ses propres textes. Il est notamment parolier pour Juliette Gréco, Jean Ferrat et Marc Ogeret. Producteur de radio, romancier et conteur, il dirige également les collections La Mémoire des sources et Contes des sages aux éditions du Seuil. (Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Henri Gougaud de Wikipédia en français).
Quand Pacôme vit ses voisins obtenir de beaux lopins de terre à des prix très modérés, il eut peur de ne pas en avoir aussi sa part, et en conféra avec sa femme.
— Il faut nous décider, et acheter de ce terrain comme les autres ; comptons nos économies.
Elles n’étaient pas lourdes, mais en vendant quelques meubles, du miel, en engageant son fils aîné comme domestique, Pacôme put avoir une plus grosse part que celle de ses voisins. Il alla signer son engagement à la ville, paya la moitié de la somme, et promit de solder le reste en deux ans.
Et voilà Pacôme qui a réalisé son rêve d’être grand propriétaire. Il ensemence ses terres.
Tout marcha à souhait pendant la première année, ses récoltes payèrent ses dettes. Il était fier de pouvoir dire « mes champs, mes bêtes, mes foins ». Les prairies lui semblaient plus vertes qu’autrefois, les arbres plus beaux, maintenant qu’ils lui appartenaient. C’est une joie que Dieu donne au paysan.
Léon Tolstoï (1868/1910)
Qu’il faut peu de place sur terre à l’homme
Elles étaient deux sœurs. L’une avait épousé un marchand établi en ville, l’autre un cultivateur de la campagne. Un jour, la sœur aînée alla voir sa sœur la campagnarde, et tout en prenant leur thé, elles se mirent à causer.
— Comme je préfère mon genre de vie au tien, dit l’aînée : je suis élégamment logée, j’ai de jolies toilettes, mes enfants sont charmants dans leurs costumes bien faits ; je mange toujours de très bonnes choses, et notre temps se passe en promenades, en visites et en fêtes le soir.
— Je conviens, répondit la cadette, que tu as une douce existence, mais que de fatigues amènent les plaisirs, et que d’argent ils coûtent ! Vous êtes sans cesse occupés à avoir assez d’argent pour faire face à beaucoup de nécessités que nous ignorons. Nous menons une vie plus régulière et plus saine, aussi nous portons-nous mieux que vous, et ne nous inquiétons-nous guère du lendemain pour vivre ; la vie de la campagne est paisible comme le cours d’une rivière large et profonde. Le proverbe dit que le bonheur et le malheur voyagent ensemble ; nous les accueillons philosophiquement quand ils passent, comme les paysans savent accueillir des voyageurs. Enfin… nous avons toujours le nécessaire.
— Vos bêtes l’ont aussi, ce nécessaire que tu vantes en ce moment, encore faut-il que vous le leur donniez ; mais votre nécessaire à vous, vous devez le faire sortir de terre, et vous suez toute votre vie au soleil, au milieu du fumier, pour cela, et vos enfants feront comme vous. — En seront-ils moins heureux ? reprit vivement la cadette. La maison qui nous abrite est à nous, et ils s’y établiront ; les champs que nous cultivons, nous les avons achetés par notre travail, nous sommes nos maîtres, et ne craignons personne. Quant à vous, vous êtes constamment inquiets, fiévreux, pressés, aujourd’hui contents, demain ennuyés. Et ton mari, quand il sort, où va-t-il ? Il joue, il boit, il perd. Qu’en as-tu, toi ?
Léon Tolstoï (1828/1910)
« Qu’il faut peu de place sur terre à l’homme. »
A suivre…