Prendre la clef des champs

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" Nous prîmes la clef des champs, et, sans guide ni renseignement quelconque (c'est là la bonne façon), nous nous mîmes à marcher, décidés à aller n'importe où, pourvu que ce fût loin, et à rentrer n'importe quand, pourvu que ce fût tard. "

Pendant trois mois, du 1er mai au 6 août 1847, deux hommes de lettres s'en vont courir la Bretagne " poitrine nue et la chemise bouffant à l'air, la cravate autour des reins, le sac au dos, blancs de poussière, halés par le soleil, souliers ferrés aux pieds, gourdin en main, fumée aux lèvres et fantaisie en tête ". 

Sur la route, Gustave Flaubert et Maxime Du Camp prennent des notes qui devaient nourrir un récit qu'ils comptent rédiger ensemble. A leur retour, ils se partagent le travail : Flaubert écrit les chapitres impairs, Du Camp les chapitres pairs. L'ouvrage ne sera connu du public qu'après la mort des écrivains.

 

Léon Tolstoï (4)

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Tout bonheur n’est qu’un rêve ! Pacôme aimerait mieux que ses voisins ne fissent pas paître leurs troupeaux sur ses prés. Il le leur dit amicalement, ils ne se gênaient plus du tout, et la nuit même, leurs bêtes se promenèrent encore dans ses champs. Il savait bien que la pauvreté seule poussait ces gens à profiter un peu de sa richesse, mais comme cela ne pouvait durer, il se plaignit au tribunal.

Il en résulta qu’on lui paya des amendes comme il en payait autrefois, et qu’on commença de le détester, et de le lui prouver en maintes occasions.

Ainsi, un jour, en traversant son bois, Pacôme vit dix trous béants à la place de dix jeunes tilleuls, arrachés la nuit précédente. 

— C’est Siemka qui a fait le coup ! s’écria Pacôme furieux, et il alla chez ce dernier.

Mais le rusé paysan avait pris ses précautions. Persuadé que Siemka était le coupable, Pacôme le dénonça, et comme on ne trouva aucune preuve, il fut acquitté au grand désappointement du plaignant, qui, chaque jour, subissait une vexation nouvelle. Pacôme était devenu un gros bonnet dans sa commune, mais il était mal avec tout le monde.

On parlait beaucoup des nouvelles contrées où allaient s’établir des gens trop à l’étroit chez eux. Pacôme se réjouissait intérieurement, et pensait que, s’il y avait des départs dans son village, il y aurait de la terre à acheter, et trouva qu’on était bien les uns sur les autres jusqu’à présent.

Un soir qu’il était assis à l’entrée de sa maison, un voyageur passa et lui demanda l’hospitalité. Pacôme le reçut cordialement, lui offrit un bon repas et le repos de la nuit.

— Où vous conduit la grâce de Dieu ? demanda-t-il le lendemain à cet homme.

Le voyageur lui dit qu’il venait des rives du bas Volga, où il arrivait beaucoup de monde, mais qu’il n’en était pas encore venu assez, que les communes faisaient placarder des appels, et que les arrivants recevaient chacun dix déciatimes de terre à labourer : une terre extraordinairement productive.

— J’ai vu un pauvre paysan, ajouta-t-il, qui ne possédait au monde que ses deux bras, ensemencer son terrain avec du froment, et vendre pour cinq mille roubles de blé !

Pacôme resta ébahi. Aussi pourquoi toujours demeurer à la même place ? Et son esprit travaillait. « Je vendrai tout ici, et avec le prix de mes terres je partirai pour le Volga, ce pays béni où je ne serai plus contrarié, ni par les uns ni par les autres. J’irai voir. »

Il partit à la belle saison, et alla jusqu’à Samara, d’où il fit le reste du trajet à pied. Arrivé à destination, il vit qu’on ne l’avait pas trompé, et que les paysans de ce pays accueillaient bien les étrangers chez eux. La commune donnait, en effet, dix déciatimes de terre au nouvel arrivant, libre à lui d’en acheter encore s’il avait de l’argent. 

Pacôme retourna chez lui, vendit tout ce qu’il possédait, maison, bétail, instruments, et, le printemps venu, il se mit en route avec toute sa famille.

Léon Tolstoï

Qu’il faut peu de place sur terre à l’homme

Le lac de La Lagüe

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Photo Marie Christine Queyeur, Lot-et-Garonne.

« C'était dans les temps anciens où les vertes collines gasconnes voisinaient avec l'immense étendue des landes désertiques. A l'orée des sables et des marécages, au pied des coteaux de Xaintrailles vivaient à Tirelauze, de riches propriétaires, Ronald et sa femme Babet, au milieu de vignes généreuses et de beaux champs de blé. Un soir de septembre, valets et servantes accroupis au pied des sarments, achevaient la vendange. Un homme apparut au bout du chemin, vêtu d'un lourd manteau, appuyé sur un bâton noueux et, s'approchant de Ronald, lui demanda une grappe de raisin pour apaiser sa soif. 

Celui-ci le chassa rudement. Le voyageur vit alors avec horreur que le visage des vendangeurs étaient recouverts d'une muselière ! Il reprit son chemin, prévenant de son prochain passage. Il revient en effet le soir de Noël ! Toutes les cloches des paroisses voisines, de Pompiey, de Fargues, de Xaintrailles, appellent les fidèles à la veillée rituelle. Valets et servantes de Tirelauze, emmitouflés dans leurs pauvres haillons s'apprêtent à la fête quand apparaît, dans la nuit, une ombre troublante. C'est le voyageur qui, à l'automne, a annoncé son retour. "Donnez-moi s'il vous plaît un verre de vin, dit-il à Ronald et Babet, ma route a été longue et j'ai très soif" Ronald s'écrit "Passe ton chemin..." Babet lève son bâton et les chiens aboient férocement. Le pèlerin alors recule, reprend sa route, lève les bras vers le ciel brillant d'étoiles. Du sol qui s'effondre dans un grand bruit jaillit une eau bouillonnante, engloutissant Tirelauze, ses prés et ses champs, ses vignes et ses bêtes. A la place de la terre maudite s'étend depuis lors un lac paisible et mystérieux : la Laguë. On dit qu'en son milieu "un gouffre bout et mêle les larmes de Ronald et Babet repentants". On dit aussi que la nuit de Noël, le chant d'un coq se fait entendre du fond du lac quand les cloches carillonnent alentour. »

Anecdote : George Sand lors de son arrivée à La Maisonneuve, en 1825, qu’on connaît davantage sous le nom du lieu-dit Guillery, a écrit dans Histoire de ma vie : c’est un « désert affreux, une lande désolée, couverte d’arbres-liège, le plus beau revenu de France, mais l’arbre le plus triste et le plus sombre... » Quelques années après, elle révisera son jugement : « ici, toutes les journées se ressemblent, je me lève tard, je déjeûne, je passe une heure ou deux au piano, je rentre dans ma chambre, je lis ou je dessine jusqu’au dîner ».

Source Facebook

Tolstoï (3)

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Quand Pacôme vit ses voisins obtenir de beaux lopins de terre à des prix très modérés, il eut peur de ne pas en avoir aussi sa part, et en conféra avec sa femme.

— Il faut nous décider, et acheter de ce terrain comme les autres ; comptons nos économies.

Elles n’étaient pas lourdes, mais en vendant quelques meubles, du miel, en engageant son fils aîné comme domestique, Pacôme put avoir une plus grosse part que celle de ses voisins. Il alla signer son engagement à la ville, paya la moitié de la somme, et promit de solder le reste en deux ans.

Et voilà Pacôme qui a réalisé son rêve d’être grand propriétaire. Il ensemence ses terres.

Tout marcha à souhait pendant la première année, ses récoltes payèrent ses dettes. Il était fier de pouvoir dire « mes champs, mes bêtes, mes foins ». Les prairies lui semblaient plus vertes qu’autrefois, les arbres plus beaux, maintenant qu’ils lui appartenaient. C’est une joie que Dieu donne au paysan.

Léon Tolstoï (1868/1910)
Qu’il faut peu de place sur terre à l’homme

 

Carême 2024

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Photo de la Baïse de nuit à Nérac, Lot-et-Garonne.

 

 "Je recommande ce qui suit comme le meilleur jeûne pendant ce carême:

Jeûnez de mots offensants et transmettez seulement des mots doux et tendres.

Jeûnez d'insatisfaction, d'ingratitude et remplissez-vous de gratitude.

Jeûnez de colère et remplissez-vous de douceur et de patience.

Jeûnez de pessimisme et soyez optimiste.

Jeûnez de soucis et ayez confiance en Dieu.

Jeûnez de lamentation et prenez plaisir aux choses simple de la vie.

Jeûnez de stress et remplissez-vous de prière.

Jeûnez de tristesse et d'amertume et remplissez votre coeur de joie.

Jeûnez d'égoïsme et équipez-vous de compassion pour les autres.

Jeûnez d'impiété et de vengeance et soyez remplis d'actes de réconciliation et de pardon.

Jeûnez de mots et remplissez-vous de silence et de la disponibilité à écouter les autres.

Si nous pratiquons tous ce style de jeûne notre quotidien sera rempli de paix, de joie, de confiance les uns dans les autres et de vie.

Source: le journal paroissial "Rencontres", de l'Avance à la Baïse, journal du doyenné de l'Albret. Février 2024 . Numéro 274

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