Voeux CFMRADIO47 de 2024
Rédigé par sadys - - Aucun commentaireBonsoir à vous tous. Merci d'avoir répondu nombreux à l'invitation de votre radio locale. Au nom de tous les membres de Cfmradio47 je vous souhaite bonne année et bonne santé.
Pour aller un peu plus loin que cette formule d'usage je vous propose les voeux de nouvel an de Madame de Sévigné née en 1626 et morte en 1696. Elle aurait écrit 800 lettres à sa fille unique et préférée dont 600 ont été publiées. Je vous avoue que je n'en ai lues aucune. Voici pour vous tous ses voeux de nouvel an:
"Que cette année vous soit heureuse: que la paix, le repos et la santé vous tiennent lieu de fortune."
Sur Facebook la semaine dernière a circulé un texte de Charly Chaplin extrait de son film "Le Dictateur". Le film date de 1940 et n'a été projeté en France qu'en 1945. En voici un bref extrait:
"Nous pensons trop et nous ressentons trop peu. Plus que de machines nous avons besoin d'humanité. Plus que d'intelligence nous avons besoin de douceur et de gentillesse. Sans ces qualités la vie perd de son sens."
Et 84 ans plus tard cette affirmation me semble être toujours d'actualité. Sur le lien suivant l'intégralité du discours de Charlot:
https://www.charliechaplin.com/fr/articles/249-Le-discours-final-du-Dictateur
Mon père et ma mère ont été instituteurs de campagne en classe unique préparant au certoch.
J'ai gardé le souvenir des jours d'école qui commençaient par une phrase de Morale inscrite au tableau noir à la craie blanche sous la date du jour. J'ai gardé l'habitude de noter dans la mémoire de mon ordinateur des phrases qui ont retenu mon attention. En voici une que je voudrais partager avec vous ce soir:
"Tout le monde pense à changer le monde mais personne ne pense à se changer lui-même." (Léon Tolstoï)
Je terminerai ma prise de parole devant vous ce soir par quelques mots de George Clémenceau (1841/1929) que j'aimerais voir se réaliser un jour:
"Le gouvernement a pour mission de faire que les bons citoyens soient tranquilles et que les mauvais ne le soient pas."
Merci de m'avoir prêté attention. Souhaitons-nous d'être tous là l'an prochain.
Dimanche 16 avril 2023
Rédigé par yalla castel - - Aucun commentaireLe pansement Schubert
Rédigé par yalla castel - - 4 commentairesClaire Oppert est née à Paris en 1966. Elle est une violoncelliste renommée. Elle a fait des études universitaires. Elle a écrit en 2020 un livre qui raconte sa participation en tant que musicienne dans des soins à des malades très malades au sein d'équipes médicales parisiennes. En voici un extrait qui permet de comprendre le titre de son livre et ce qu'elle fait pour soigner par la musique des personnes en grandes souffrances.
Avril 2012. Paris, Korian Jardins d'Alesia.
Les feuilles du grand chêne devant les fenêtres de l'EHPAD, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, tremblent de lumière, dans la clarté du printemps.
A l'étage des résidents déments, la porte de la salle commune que l'on nomme Espace est grande ouverte.
C'est curieux le terme espace. Je cherche dans le dictionnaire la définition de ce mot: étendue qui embrasse l'univers, vide interplanétaire, intersidéral et intergalactique.
En entrant dans l'Espace, j'éteins la télé. Chaque lundi c'est comme un rite.
La télé reste allumée toute la journé, pourtant personne ne la regarde. En s'éteignant, elle fait un bruit singulier de machine avalée, et laisse toujours quelques traces grises dans le silence.
L'étage des vingt et un résidentes déments est protégé. Il s'appelle même unité de vie protégée. L'ascenseur est à code. Je l'oublie toujours quand j'arrive devant. C'est drôle.
Dans un coin de l'Espace, une femme hurle et se débat. Deux infirmières s'agitent autour d'elle, la maintenant fermement pour l'empêcher de tomber de son fauteuil, tout en parant ses attaques.
Elles doivent absolument refaire le pansement de Mme Kessler. La plaie de son bras droit est purulente.
Je ne peux deviner son visage caché par le profil des infirmières aux sourcils froncés et aux gestes tendus. Lorsqu'elle cesse de crier, elle tente de les mordre.
Je ne sais pas ce qui me pousse à m'arrêter devant elle. Je ne prononce pas une parole. Je m'assieds et lui joue au violoncelle le ttème de l'andante du Trio op 100 de Schubert.
Il se passe trois secondes à peine, deux mesures peut-être, et son bras se détend. Il s'abandonne d'un coup. Les cris cessent, le calme revient dans la pièce. Je peux observer alors son visage, regard étonné, et à ses lèvres une ébauche de sourire.
Je joue peu ce jour-là, tant le pansement est rapide. C'est plus qu'une surprise, comme un prodige. Je vois les infirmières sourire à leur tour, l'une d'elles rit même et me dit: "Il faudra absolument revenir pour le pansement Schubert".
C'est joliment tourné, tout à fait adéquat. L'expression est née ainsi et elle est restée par la suite.
Quand je m'éloigne, je sais déjà qu'il s'est passé quelque chose d'essentiel. Je suis confrontée pour la première fois à l'évidence d'un résultat de soulagement radical d'une personne douloureuse. Et quand, un an plus tard, je mets au point sur plus d'une centaine de patients en fin de vie, à l'unité de soins palliatifs de l'hôpital Sainte-Périne à Paris, le protocole du Pansement de Schubert" expérimenté spontanément à l'Espace des déments, le médecin chef du service à cette formule brève et éloquente: "10 minutes de Schubert=5 mg d'Oxynorm". (1)
Il y aura Schubert, mais aussi Bach, Mozart, Beethoven, Brahms, Rachmaninov, des aires de Puccini et Verdi, des chansons de Piaf, Cloclo, Sardou, Adamo, Johnny, des valses et des tangos, des chants juifs, arabes et africains, du folklore breton, irlandais, du flamenco, des musiques de films, du gospel, du jazz, du rock, du pop, du métal!
La même semaine, je reviens deux fois pour accompagner le pansement de Mme Kessler, avec des résultats identiques. Il n'y a pas d'autre manière de soulager sa douleur. Elle est assise dans son fauteuil toute droite, avec son bras offert aux soins et, tandis que je joue pour elle en boucle le thème de l'andante du Trio op.100 de Schubert, la lumière sur son visage est si intense qu'elle irradie en un flot étincelant toute la pièce, les infirmières et moi-même. Dehors le chêne aux larges branches en reçoit lui aussi abondamment. C'est du moins ce qu'il me semble, quand je le salue en partant.
Source: Pages 9, 10 et 11 du livre de Claire Oppert qui a pour titre "Le pansement Schubert" chez Denoël.
(1) Oxynorm: antalgique apparenté à la morphine indiqué dans le traitement des douleurs cancéreuses sévères