Labourage et pâturage

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Rédigé par Walther | Le

Bonjour!

Second manifeste…Surréaliste? Ah si seulement quelques pages signées par des gens connus pouvaient changer quelque chose en ce bas monde!

On peut craindre, hélas, que ce ne soit encore et encore qu’un essai, un essai non transformé, laissant sur leur faim, les citoyens lecteurs, la partie sifflée ou livre refermé.

Une invitation à la « scienza nuova » de ce cher Monsieur Dupuy, au début des années quatre-vingt, accompagné de penseurs que nous retrouvons aujourd’hui dans le billet de Monsieur Bougnoux, est-elle restée lettre morte et l’enquête définitivement close? En tout cas randonnée carnavalesque toujours inachevée et des milliers de gens laissés au bord du chemin. Telle est la réalité dans la simplicité de la complexité, mes bons amis. Et court, court le guépard du cinéaste.

En ce temps-là, un syndicaliste agricole avant de devenir Ministre de l’agriculture m’écrivait sur la contribution du paysan à l’universel et le papa d’un Premier ministre qui fut aussi à l’Agriculture, cité par Gaston Bachelard dans « Le rationalisme appliqué », m’entretenait sur les sensations captées par l’organisme humain émanant des profondeurs de la terre.

En ce temps-là, un résistant sillonnait les routes du pays pour faire entendre son cri « France, fais ta prière! » dans les salons des Conseils généraux.

Et beaucoup d’eau est passée sous le pont de Tancarville…

Aujourd’hui, un prêtre mineur, lecteur de Machiavel, locataire du Palais de l’Élysée, dit solennellement à un groupe d’agriculteurs l’écoutant avec une certaine crainte révérencielle, au salon de l’agriculture, que ce serait ruiner la France que de donner aux paysans retraités et consorts indépendants, une pension de 1000 euros par mois.

Pas de réactions de la part des céréaliers bien sages de l’île-de-France et de leur représentante nationale dont le directeur au sein de son organisation syndicale agricole,gagne 13400 euros par mois, selon Médiapart. On sait que l’un des responsables de ladite organisation principale du syndicalisme agricole a fait l’objet de critiques acerbes, extrêmement vives, de la part d’un ministre de l’agriculture dans son livre « Politique folle ». Savez-vous, chers amis citadins, que cette vitrine commerciale artificielle qu’est le salon international de l’agriculture est loin, très loin d’être l’image de la France paysanne profonde en voie de totale disparition? Une majorité silencieuse du milieu agricole et rural qui ne casse rien, qui ne fait partie d’aucun syndicat et qui a pour seule arme légitime son bulletin de vote, qui ramasse les miettes de la Politique agricole commune, est dégoûtée de cette situation. Et s’installe un climat de lassitude, de platitude morne, à l’image des fermes abandonnées et des bâtiments qui menacent ruine attendant d’être vendus pour payer l’antichambre de la mort.

Imaginez un instant, les amis de Monsieur Philippe Martinez face à ce petit jeune homme riche leur faisant, devant les caméras, la leçon du manque d’argent pour améliorer les retraites des conducteurs de train! De telles paroles à leur égard auraient mis la France entière à feu et à sang.

Quelle « commune d’un temps revenu » pourrait servir maintenant la cause des oubliés du système qui n’ont pas vu augmenter d’un centime leur pension de retraite depuis l’élection de notre marcheur sans Thoreau, au milieu des allées sans âme d’un salon de la porte de Versailles?

On imagine un décor surréaliste qu’eût aimé sans doute Messieurs Aragon et Breton… Des paysans tout de noir vêtus, le visage voilé pour ne pas dire masqué, tournant le dos à l’hôte de passage avec des inscriptions à faire frémir sur des panneaux, au-dessus de cette caverne des ombres, laissant hébétés tous ces veaux dont la peau se tend à la fin des repas, comme disait Philippe Bouvard dans son « Oursin dans le caviar », il y a des décennies.

Mais qui peut réaliser tel acte de résistance qui pense aux fins de mois et au devoir de connaissance, consubstantiel du droit de rêver?

Or cette connaissance est la cognée du bûcheron entendu par Jupiter dans la fable. La décence en fait bien sûr partie.

Quant au reste…celui du poète, ne serait-il, chers amis, que littérature?

Je viens à l’instant de recevoir un livre offert par l’auteur.

Son titre : « L’intelligence collective, clé du monde de demain »

Lui aussi parle, écrit comme tant d’autres dans les centres de réflexion, censés préparer l’avenir.

Mais quid de notre rapport à la terre ignoré des mains blanches qui ne semblent pas connaître dans la pâte du réel, cette « incertaine » liberté, explication ultime de notre propre liberté?

Dans les palaces pour habiles conférenciers de luxe et dans les salles de réunion des clubs du troisième âge où l’on tape le carton, lit-on, vrais honnêtes gens, un article révélateur de Conway et Kochen?

Mon sympathique, bouillant et atypique correspondant, auteur du livre susmentionné cite une expression de Luc Ferry « Les vrais gens », page 288.

Auteur d’une dictée, ce philosophe mentionné aurait-il commis une faute? Bien entendu, comme chacun sait, il faut écrire « Les vraies gens »

« Il y a un indicible bonheur à savoir tout ce qui en l’homme est exact. » ( Jean-Marie Gustave le Clézio.)

Il y a l’inter, bien sûr, ou le trait d’union! Il y a aussi sûrement le sur ou l’accent circonflexe dit l’hirondelle de l’écriture.

Sur la route tracée, allons vers ce puits. Cerise sur le gâteau ou le temps retrouvé.

A méditer, peut-être, si le cœur vous en dit en carême-prenant, dans les sentiers de la vie trine du désir, là-bas au salon de la terre.

Walther

Source: https://media.blogs.la-croix.com/combattre-la-demesure-2-la-relance-convivialiste/2020/02/22/#comments

 

Revue de blog février 2020

Rédigé par yalla castel - - Aucun commentaire

Ils sont forts en gueule, mettent les rieurs de leur côté et gouvernent en-dehors des règles. Ils sont surtout propulsés par des électeurs en colère contre des institutions perçues comme un "système". Nous avons cherché à comprendre auprès d'un historien et de spécialistes en sciences politiques pourquoi, de Trump à Salvini, la dérision étaient désormais si payante pour s'imposer en politique.

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Au bord du monde

Rédigé par yalla castel - - Aucun commentaire

En 2017, Alice Gapail, jeune étudiante lot-et-garonnaise, demandait aux responsables de CFM Radio 47 de faire un stage dans notre radio associative locale. Et c'est là que nous nous sommes rencontrés. Aujourd'hui dans le cadre du programme d'étude Erasmus (1), Alice Gapail est actuellement  en Estonie. Elle prépare une licence de science politique et journalisme.Voici ce qu'elle a écrit en 2017 sur un film qui lui tenait à coeur et qui reste malheureusement d'actualité:

A Paris, la nuit, dans la rue, le métro, sous les ponts ou le périphérique, le réalisateur Claus Drexel (2) a tenté d’établir les portraits d’une dizaine de sans-abris, afin que face à la caméra ils racontent leur vie au bord de la société.

 Un long-métrage sur les sans-abris, pourquoi ?

« Au bord du monde », film aux multiples distinctions notamment présenté à Cannes en 2013 et nommé pour le prix Louis-Delluc, est sorti en 2014. Sur le modèle d’un documentaire, il s’agit avant tout de laisser la parole aux sans-abris, et ce sans commentaires afin de n’entendre que leur voix. C’est donc de bon cœur que 13 d’entre eux s’expriment en toute liberté sur la vie et le monde qui les entoure.

Durant 98 minutes, pas de misérabilisme ni de trash mais de la sincérité. Il ne s’agit pas d’un film militant mais humaniste, le but étant de remettre au centre de l’image des individus habituellement relégués au bord du monde.

Telle une longue épopée de nuit, à Paris, ce long métrage est l’occasion d’une remise en question, l’occasion de rencontrer des personnalités oubliées.

On les voit partout, mais on ne les entend nulle part

« Au bord du monde » c’est tout d’abord un film qui aborde le regard des autres. Dans l’ombre, les sans-abris sont souvent vus tels des « parasites » pour la société. Mais la plupart des gens oublient qu’en fait ils sont des êtres humains, des personnes dotées de sensibilité. Pourtant, certains détournent le regard, sont gênés en leur présence : pourquoi ?

« La société n’accepte pas la pauvreté. Ils sont terrifiés à l’image que cela leur renvoie d’eux-mêmes. Nous ignorer, c’est se protéger quelque part » confie Pascal, l’un des sans-abris interrogés.

Humiliation, infantilisation, perte de la dignité et de la confiance en soi, les sans-abris sont délaissés, comme s’ils n’avaient jamais existé.

Deux. C’est le nombre de fois où l’on parle d’eux pendant l’année : l’été, puis l’hiver. Le reste du temps, on fait comme s’ils n’existaient pas car les regarder, voir la vérité serait trop inconfortable.

« Les gens ne sont plus solidaires entre eux » avance Michel, Sans Domicile Fixe. Démonstration d’un individualisme grandissant, le film montre comment nous oublions progressivement l’autre. Comment nous nous octroyons le droit de le considérer comme inférieur, encouragés par notre indifférence égoïste.

Ce sont des naufragés de la société

Quelques habits, un duvet et parfois une tente : c’est tout ce qu’il leur reste.

Christine, à la rue depuis 4 ans confie : « J’ai tout perdu. Mes papiers, mes habits, la photo de mes enfants. J’avais un appartement et du jour au lendemain je me suis retrouvée dans la rue. Aujourd’hui, je ne sais pas quoi faire, je suis résignée ». Chacun de ces mots soulèvent des questions sans réponses : pourquoi sont-ils là ? n’ont-ils rien fait pour empêcher cela ? pourquoi restent-ils sans rien faire, à attendre ?

Claus Drexel exprimait à ce propos que jamais il ne leur posait l’une de ces questions, ne voulant d’aucune façon les embrasser, les diminuer. Il cite alors :

« La rupture avec la société est une bascule dans un autre monde.

Comment s’est-elle produite ? Comment a-t-elle eu lieu ?

Nul ne s’en souvient. C’est comme une autre naissance… »

(George Orwell)

Avant d’ajouter : « Je fais cela pour rencontrer la personne. Ces derniers m’intriguent. Ce qu’il s’est passé avant, je n’en ai pas grand-chose à faire. »

Face à la misère ambiante : quelques aides telles que les Restos du Cœur, la Croix rouge, des associations, mais rien qui ne leur permette de vivre décemment.

L’espérance de vie d’un SDF en France est de 48 ans. Les conditions de vie dans lesquelles ils évoluent sont à l’origine de ce chiffre alarmant. Pas d’hygiène, pas de nourriture, pas d’eau potable, c’est un retour à l’Age de pierre. Le sommeil, lui aussi est perturbé et difficile à trouver, certains ne dormant que quelques heures par nuit.

Marco explique quant à lui que :  « Le plus dur c’est l’hiver, on essaie de trouver des endroits isolés. On a pris nos habitudes et c’est le monde à l’envers, le mauvais rythme. On fait notre vie en fonction du froid , on dort très peu ».

Alors quand le soir nous rentrons dans nos maisons, eux restent seuls et ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Une bataille entre l’esprit et le corps s’impose, souvent. Le corps voudrait abdiquer mais l’esprit lutte, toujours. « Car c’est humain de ne pas vouloir mourir ». Christine déclare « être surprise de se réveiller l’hiver ». Avant, elle pensait « qu’aucun être humain ne pouvait survivre à ça ».

Durant l’hiver 2016, ce sont 501 sans-abris qui sont morts dans les rues. La moyenne d’âge était de 49,6 ans. Et 11 étaient des mineurs dont 6 avaient moins de 5 ans. Des chiffres alarmants, dénonciateurs d’une grande problématique restant, en vain, non résolue.

La vie dans le rue : toute une organisation 

Afin de se nourrir les sans-abris ne comptent pas exclusivement sur la manche, celle-ci n’étant pas pratiquée par tous et constituant un trop faible « revenu ».

Généralement, les invendus sont la première source d’alimentation des SDF. Wenceslas explique : « Vers 4-5 heures du matin je dois partir de l’endroit où j’ai passé la nuit. C’est juste avant que les gens partent travailler. Ensuite, je vais faire les poubelles des restaurants». Si de nombreuses personnes l’ignorent, c’est parce que la police s’assure que l’ensemble des lieux concernés soient libérés avant 6 heures. Une pratique qui dénonce à la fois la considération de la société envers ces derniers, ainsi que le manque de moyens pour leur venir en aide.

Dans la rue, il y a également une hiérarchie. Celle-ci peut être établie en fonction de différents critères : le logement, pouvant avoir plusieurs formes (Le squat, la cabane, la tente et ensuite le duvet), la propreté, qui est un facteur très important pour certains d’entre eux, ou encore la manche. L’un des SDF interrogés explique : « Faire la manche est aussi une humiliation. C’est donc une étape à franchir, tout le monde ne fait pas la manche ».

On se réconforte dans les souvenirs

Les souvenirs constituent souvent le premier des réconforts face à la solitude de la rue. Certains avancent aussi  : « Le bonheur ce n’est plus le matériel , c’est la nature, les situations tranquilles, les animaux, les espaces verts. »

D’autres expliquent : « La foi aide beaucoup et surtout, sourire malgré la difficulté ».

Leur situation fait que la plupart d’entre eux comprennent ce que d’autres ne comprendront jamais : « Le bonheur c’est l’amour, les amis, la santé. Le reste est sans importance ».

Le réalisateur explique avoir voulu filmer de nuit durant tout le documentaire afin d’imager la solitude de ces personnes, ainsi que le coté « fantomatique » de leur existence, de Paris la nuit. Il a décidé de réaliser ce documentaire dans la ville lumière afin de souligner le contraste entre sa beauté et la misère de ces gens, afin que le message soit plus fort, plus puissant.

Jamais il n’a filmé en contre plongé, mais toujours près du sol, à leur niveau afin d’éviter d’avoir « un regard d’en haut vers en bas ». Le but étant justement que le spectateur se mette à leur niveau. Le but étant, qu’ils rencontrent ces personnes et qu’ensemble ils s’assoient « Au bord du monde ».

 Alice Gapail.

 

(1) Le programme Erasmus (EuRopean Action Scheme for the Mobility of University Students), généralement appelé Erasmus, est un programme d'échange d'étudiants et d'enseignants entre les universités, les grandes écoles européennes et des établissements d'enseignement à travers le monde entier.

 

(2) Claus Drexel, né le 24 juin 1968, est un scénariste, réalisateur et metteur en scène allemand, travaillant majoritairement en France.

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