Léon Tolstoï (4)

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Tout bonheur n’est qu’un rêve ! Pacôme aimerait mieux que ses voisins ne fissent pas paître leurs troupeaux sur ses prés. Il le leur dit amicalement, ils ne se gênaient plus du tout, et la nuit même, leurs bêtes se promenèrent encore dans ses champs. Il savait bien que la pauvreté seule poussait ces gens à profiter un peu de sa richesse, mais comme cela ne pouvait durer, il se plaignit au tribunal.

Il en résulta qu’on lui paya des amendes comme il en payait autrefois, et qu’on commença de le détester, et de le lui prouver en maintes occasions.

Ainsi, un jour, en traversant son bois, Pacôme vit dix trous béants à la place de dix jeunes tilleuls, arrachés la nuit précédente. 

— C’est Siemka qui a fait le coup ! s’écria Pacôme furieux, et il alla chez ce dernier.

Mais le rusé paysan avait pris ses précautions. Persuadé que Siemka était le coupable, Pacôme le dénonça, et comme on ne trouva aucune preuve, il fut acquitté au grand désappointement du plaignant, qui, chaque jour, subissait une vexation nouvelle. Pacôme était devenu un gros bonnet dans sa commune, mais il était mal avec tout le monde.

On parlait beaucoup des nouvelles contrées où allaient s’établir des gens trop à l’étroit chez eux. Pacôme se réjouissait intérieurement, et pensait que, s’il y avait des départs dans son village, il y aurait de la terre à acheter, et trouva qu’on était bien les uns sur les autres jusqu’à présent.

Un soir qu’il était assis à l’entrée de sa maison, un voyageur passa et lui demanda l’hospitalité. Pacôme le reçut cordialement, lui offrit un bon repas et le repos de la nuit.

— Où vous conduit la grâce de Dieu ? demanda-t-il le lendemain à cet homme.

Le voyageur lui dit qu’il venait des rives du bas Volga, où il arrivait beaucoup de monde, mais qu’il n’en était pas encore venu assez, que les communes faisaient placarder des appels, et que les arrivants recevaient chacun dix déciatimes de terre à labourer : une terre extraordinairement productive.

— J’ai vu un pauvre paysan, ajouta-t-il, qui ne possédait au monde que ses deux bras, ensemencer son terrain avec du froment, et vendre pour cinq mille roubles de blé !

Pacôme resta ébahi. Aussi pourquoi toujours demeurer à la même place ? Et son esprit travaillait. « Je vendrai tout ici, et avec le prix de mes terres je partirai pour le Volga, ce pays béni où je ne serai plus contrarié, ni par les uns ni par les autres. J’irai voir. »

Il partit à la belle saison, et alla jusqu’à Samara, d’où il fit le reste du trajet à pied. Arrivé à destination, il vit qu’on ne l’avait pas trompé, et que les paysans de ce pays accueillaient bien les étrangers chez eux. La commune donnait, en effet, dix déciatimes de terre au nouvel arrivant, libre à lui d’en acheter encore s’il avait de l’argent. 

Pacôme retourna chez lui, vendit tout ce qu’il possédait, maison, bétail, instruments, et, le printemps venu, il se mit en route avec toute sa famille.

Léon Tolstoï

Qu’il faut peu de place sur terre à l’homme

Léon Tolstoï (2)

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Pacôme, le paysan, qui fumait tranquillement sa pipe derrière le poêle et écoutait cette conversation, pensa : Comme ma femme a raison ! Grâce à notre petite mère la Terre, nous sommes plus sages, et nous ne songeons guère aux folies. Si, seulement, notre propriété était plus grande, alors je braverais tout, même le diable.

Or, ce dernier, qui était aussi dans la chambre, entendant ce discours et la réflexion du paysan, se dit : « Ah ! tu ne me craindrais pas si tu avais plus de terre à cultiver ! Eh bien ! je vais t’en donner, et tu verras ! »

Il y avait, près de chez Pacôme, une petite propriétaire d’une terre d’environ cent vingt déciatimes. Elle vécut en très bons termes avec lui, jusqu’au jour où elle engagea, comme intendant, un ancien militaire en retraite, qui infligea tant de vexations aux paysans, et les mit si souvent à l’amende, que tout le village en était consterné.

Pacôme, surtout, subissait la mauvaise humeur du nouvel intendant. C’était un jour son cheval qui mangeait quelques épis d’avoine, un autre jour, la vache qui pénétrait au jardin, une autre fois, les veaux avaient mangé de jeunes pousses. Ça n’en finissait pas. Le paysan payait ses amendes, et déversait ses colères rentrées sur sa femme et ses enfants. On apprit enfin que la propriété était à vendre, et que l’intendant voulait l’acheter. « Si ce méchant homme devient propriétaire, nos malheurs ne sont pas finis, dirent les paysans réunis, allons demander à cette dame de vendre son bien à la commune. »

Ils lui offrirent une somme plus forte que celle qu’offrait l’intendant, et la commune devint propriétaire du domaine. Les paysans voulurent alors partager le bien entre eux, mais comme ils ne parvenaient point à s’entendre, ils décidèrent que chacun d’eux achèterait autant de terre qu’il en pourrait payer.

Léon Tolstoï (1868-1910)
Qu’il faut peu de place sur terre à l’homme

 

Prier avec Blaise Pascal (2)

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"Le divertissement devrait procurer à l'homme le bonheur tant attendu; il le jette dans une course sans fin. A peine une activité terminée, voilà qu'il faut se lancer dans une autre. Les plaisirs que l'homme parvient à cueillir dans cette agitation  sont toujours en deçà du bonheur qu'il espérait, et l'homme camoufle sa déception dans un nouveau divertissement qui promet à son tour le bonheur, pour le remettre bientôt à plus tard. L'homme devrait s'instruire de ses déceptions successives, mais il paraît courir à leur devant." 

Source: "Prier 15 jours avec Blaise Pascal" par Louis Frouart aux éditions Nouvelle Cité. 

ISBN 9782375820445. Prix: 13,90 €.

Louis Frouart est né en 1986. Il est lauréat du prix 2014 de la chaire "Science et Religion" de l'Université catholique de Lyon. Il est actuellement professeur de philosophie dans un lycée de Lyon.

Radio Présence

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Radio Présence est une radio généraliste chrétienne à vocation régionale qui diffuse ses émissions quatre heures par jour sur la région Midi Pyrénées. Elle se veut une radio de proximité, une radio libre, s'adressant à tous et donnant un point de vue chrétien sur la société dans laquelle nous vivons. Radio Présence est à dimension humaine, animée par 20 salariés et près de 100 bénévoles. Radio Présence collabore avec de nombreuses autres radios chrétiennes avec lesquelles elle échange des programmes. (Radio Vatican, Radio Notre Dame, RCF, Radio Fidélité, Radio Salve Régina, Radio Lapurdi, Radio Ecclesia et Radio Espérance).

 Le Mercredi 17 mai 2023 j'ai écouté Radio Présence sur mon smartphone connecté à internet. J'y ai écouté l'émission de philosophie réaliste de Claire Bressolette qui a pour titre "personne et liberté". Voici quelques notes écrites prises pendant mon écoute.

L'être humain n'est pas un oiseau qui vole de branches en branches. Les humains sont des animaux qui ont conscience de leur mort. Ils sont capables d'être indépendants et autonomes. Ils savent en grandissant qu'ils seront capables de penser leur vie. Ils sont libres de faire le Bien ou le Mal. Ils ont la faculté de faire des choix de vie.Mais c'est plus compliqué que de choisir entre quinze marques de yaourts et deux cent quarante sept chaînes de télévision. Dans cette émission de radio l'humain est considéré comme un être spirituel maître de son destin. Sa  volonté lui permet de garder (ou pas)  l'intégrité de son corps. A la racine de la liberté humaine il y a la capacité de choisir. C'est parce que l'homme est doué de raison qu'il peut ne pas toujours suivre ses instincts.Mais un groupe d'hommes de femmes libres ne fait pas pour autant une société libre. Notre vie sur terre a un sens et nous savons surtout qu'elle a une fin. Nous sommes faits pour voir Dieu. L'homme ne peut se libérer de sa condition humaine (né pour mourir) qu'en se divinisant. Il est dès sa naissance prisonnier de son corps animal. C'est en se civilisant qu'il se libère de son animalité.Il se doit de devenir une personne libre et autonome. Son devoir est de développer sa personnalité en se cultivant. Il ne peut le faire que par un travail de volonté personnelle. Devenir libre est un long chemin de vie. Il n'est pas tracé d'avance. Il se fait en marchant. Par la volonté du marcheur. 

Jacques Maritain est très présent tout au long de cette émission de radio de 24 minutes. 

Son nom est mentionné dans plusieurs livres de François Mauriac. En son temps il a été un philosophe reconnu. Il souhaitait pour notre pays une troisième voie: ni communisme ni socialisme ni capitalisme. Il souhaitait une vie économique, sociale, politique inspirée par les Evangiles. Il souhaitait une démocratie chrétienne pour notre pays. 

Il naît  en 1882 à Paris et grandit dans une famille protestante. En 1906 il se convertit au catholicisme. Philosophe et homme de lettres il a été Professeur à Paris, au Canada et aux États Unis. Il a été un acteur important du renouveau intellectuel et spirituel du catholicisme français de 1912 à 1944. Le général De Gaulle l'avait nommé ambassadeur de France au Vatican de 1945 à 1948. Il a été le mari de Raïssa Oumancoff, poète et philosophe juive convertie elle aussi au catholicisme. Les œuvres complètes de Maritain sont co-signées avec Raïssa. A la mort de son épouse il est accueilli chez les Petits frères de Jésus à Toulouse où il meurt en 1973.

Source: https://www.radiopresence.com/

 

 

 

De la philosophie de la lumière

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Source photo: wikipédia

Le distributisme, ou distributionnisme ou encore distributivisme, est une philosophie économique de « troisième voie » entre le socialisme d’État et le capitalisme, formulée par les penseurs catholiques Gilbert Keith Chesterton et Hilaire Belloc comme une tentative d’appliquer les principes de justice de la doctrine sociale de l’Eglise Catholique.

« Supposez qu’un tumulte s’élève de la rue à propos de n’importe quoi, d’un réverbère, mettons, que maintes personnes influentes désirent démolir. Un moine, vêtu de gris, qui est l’esprit du Moyen Âge, est sollicité sur la question et il commence par dire, à la manière aride des scolastiques : « Considérons tout d’abord, mes frères, la valeur de la lumière. Si la lumière est en soi bonne… » A ce moment-là, on le jette à terre, ce qui est assez compréhensible. Tout le monde se précipite sur le réverbère, qui se retrouve par terre au bout de dix minutes, et chacun s’en va en félicitant son prochain de ne pas manquer de sens pratique. Mais, avec le temps, les choses ne se résolvent pas aussi facilement. Certains ont démoli le réverbère parce qu’ils voulaient la lumière électrique; d’autres parce qu’ils voulaient de la vieille ferraille; d’autres encore parce qu’ils voulaient l’obscurité, pour dissimuler leurs mauvaises actions. Certains pensaient qu’il ne suffisait pas d’un réverbère, d’autres qu’il était de trop; certains se comportèrent ainsi parce qu’ils voulaient détruire le matériel municipal; d’autres parce qu’ils voulaient casser quelque chose. Et c’est la guerre dans les ténèbres, personne ne sachant qui il frappe. Ainsi, progressivement et inévitablement, aujourd’hui, demain ou le jour suivant, la conviction reviendra que le moine avait raison après tout, et que tout dépend de ce qu’est la philosophie de la lumière. Seulement, ce dont nous aurions pu discuter sous la lampe à gaz, il nous faut en discuter à présent dans l’obscurité. »

Gilbert Keith Chesterton 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Distributionnisme

Les guerres ne favorisent guère les discussions… Les ténèbres non plus…

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