La France de notre enfance (3)

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" Tout ce qui se trouvait dans les maisons avait été acheté avant la guerre. Les casseroles étaient noircies, démanchées, les cuvettes désémaillées, les brocs percés, colmatés avec des pastilles vissées dans le trou.  Les manteaux étaient retapés, les cols des chemise retournés, les vêtements du dimanche passés au tous-les-jours. Qu'on arrête pas de grandir désespérait les mères, obligées de rallonger les robes d'une bande de tissu, d'acheter des chaussures une pointur au-dessus, trop petites un an après. Tout devait faire de l'usage, le plumier, la boîte de peinture Lefranc et le paquet de petits-beure Lu. Rien ne se jetait. Les seaux de nuit servaient d'engrais au jardin, le crottin ramassé ddans la rue après le passage d'un cheval à l'entretien des pots de fleurs, le journal à envelopper les légumes, séchèr l'intérieur des chaussures mouillées, s'essuyer aux cabinets. On vivait dans la rareté de tout."

"Les Années", pages 38/39 d'Annie Ernaux.

Du confinement et de ma pauvreté

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Au 32 ième jour de confinement scrupuleusement respecté non pas par discipline, obéissance, vertu, sens civique mais par le désir que le covid 19 ne passe pas par moi comme le sida n'est pas passé par moi et donc pour sauver des vies, je me sens riche de nos six enfants et huit petits-enfants. Mais je me sens pauvre de ne plus les voir, les toucher, les embrasser "pour de vrai". Nous avons fait une fois une communication tous ensemble par whatsApp. Je n'ai pas recommencé et je n'ai pas demandé à nos enfants de recommencer. Les voir sur l'écran d'une tablette ou d'un ordi c'est comme voir des choux à la crème dans la devanture du pâtissier avec l'interdiction de les manger (d'amour bien sûr). Ils me manquent. Mais je me sens riche de toutes les petites choses que nous avons faites ensemble. Petites choses qui font notre histoire familiale. Seul dans le confinement au fond de mon jardin ou de mon lit, je me refais le fil de ma vie avec eux. Je chasse les mauvais souvenirs de mon esprit, je ne garde que le bon, le beau, le bien.

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Au 32 ième jour de confinement scrupuleusement respecté non pas par... etc...etc... je me sens pauvre de ne plus avoir de contacts "pour de vrai" avec les bénévoles du CCFD Terre Solidaire, des Captifs la libération de Bordeaux, de l'union d'aide à domicile de Casteljaloux, du club de judo casteljalousain, de la radio locale. Ils me manquent. Mais je me sens riche de toutes les petites choses que nous avons faites ensemble. Petites choses qui font notre Humanité, notre fraternité. Seul dans le confinement au fond de mon jardin ou de mon lit, je me refais le fil de ma vie avec eux.Je chasse les mauvais souvenirs de mon esprit, je ne garde que le bon, le beau, le bien.

 

Au 32 ième jour de confinement je ne compte plus les nuits passées les contrevents ouverts, les rideaux ouverts ( mais les fenêtres fermées, en avril ne te découvre pas d'un fil) à regarder le ciel étoilé. Je me suis senti pauvre spirituellement, en panne de Dieu, en panne de prières. Je percevais trop la présence du Diable dans les ténèbres de la nuit et des jours qui n'en finissent pas à ne plus pouvoir sortir, aller ici et là à ma guise. Mais je me suis senti riche de tout ce que j'ai trouvé à faire dans la maison et autour de la maison.

 

J'ai enfin trouvé le temps de ranger des livres, de ranger des notes de lecture, De faire tout ce que je repoussais aux lendemains qui chantent.

 

Au 32 ième jour de confinement scrupuleusement respecté j'ai enfin fait mienne la pensée de Jacques Prévert: "D'abord la peur de la mort puis la mort de la peur et enfin l'amour de la vie". Je n'ai jamais autant aimé la vie que depuis que je sens que je n'ai plus la vie devant moi. Je me sens pauvre de jours encore à vivre et riche de la capacité de savourer ceux qu'il me reste à vivre. J'aimerais mourir de mort lente mais pas trop douloureuse et surtout pas tout de suite, J'aimerais mourir avec quelqu'un qui me tient la main au moment du mauvais passage.

 

Au 32 ième jour de confinement scrupuleusement respecté non pas par discipline, obéissance, vertu, sens civique mais par le désir que le covid 19 ne passe pas par moi comme le sida n'est pas passé par moi et donc pour sauver des vies, je me sens pauvre de cette solitude imposée par les circonstances et riche de cette solitude qui me laisse du temps pour écrire.

"Tout le monde va à la solitude. Tout le monde vieillit seul, meurt seul. La solitude attend chacun comme un paradis ou un enfer. Comme la mer attend le naufragé. S'il sait nager, elle le sauve. S'il ne sait pas nager, elle le noie. Mais au vrai, la solitude et la mer ne noient ni ne portent. On y est porté ou noyé selon soi et non selon elles."

"Frère Antoine, une bouffée d'ermite", collection livre de poche "Pocket", ISBN 2-266-09453-x

 

De la pauvreté du débat politique et de ma pauvreté pour y participer

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Le Covid 19 a plongé notre pays dans un état jamais atteint par les plus fortes grèves que notre pays aient connu à ce jour. Pour beaucoup de personnes c’est la faute aux gaulo-communistes, à l’état omni-présent, aux fonctionnaires, à la société française héritée du front populaire, à la gauche, aux gauchistes etc…etc… Pour d'autres la faute de ce que nous vivons est rejetée sur les divisions suicidaires des droites françaises, sur le libéralisme, la loi du marché, la globalisation, la mondialisation, la faiblesse et les divisions des états européens etc… etc… Les réalités quotidiennes de l’épidémie ont balayé les contreverses sur les migrants pauvres, le foulard, le voile, la burqa, l’islamo-fascisme, le grand remplacement etc… Les questions qui se posent désormais à nous sont multiples. De quoi demain sera fait? De plus du monde d’hier? Ou de moins du monde d’hier? Car sur le fond l’ampleur du Covid 19 elle est surtout due à notre mode de vie et de consommation. Un avion par seconde décollait dans le monde d’hier. Nous mangions en toutes saisons des fraises, du raison, des mangues, des asperges. Et nous trouvions cela normal. Nous trouvions normal de payer moins cher la nourriture que du temps de nos grands parents. Et nous trouvions normal qu’il y ait des riches et des pauvres, et des riches de plus en plus riches et des pauvres de plus en plus pauvres. Une fois l’épidémie de Covid 19 passée nous ferons quoi? Tout comme avant ou autrement? Et l’autrement il doit être comment? Pourrons-nous mener le débat? Dire notre mot dans la construction du monde de demain? Serons-nous assez responsables pour au moins essayer de le faire? (Pas pour nous mais pour nos enfants et petits-enfants) L’avenir va nous le dire assez vite. Mais je me sens pauvre et démuni pour faire entendre aux autres le monde que j'aimerais laisser aux générations futures. Le confinement et la distanciation sociale ce n'est pas mon ADN ni les valeurs qui m'ont été transmises par mes parents et grands-parents. Je me sens très pauvre de ne plus être en contact pour de vrai avec les autres mes frères de coeur et d'âme.

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