Aurélien

Rédigé par yalla castel - - 2 commentaires

En 1981, je suis nommé instituteur adjoint dans une école de campagne à deux classes. Je découvre une commune rurale et ses habitants que je ne connaissais pas. Parmi les rencontres que je vais faire, une m’a marqué: celle avec Aurélien M… Il est à l’époque conseiller municipal. Il est paysan. Il travaille avec son jeune frère leur propriété héritée de leurs parents. J’apprendrai par un collègue qu’il a été premier de son canton aux épreuves du Certificat d’études avant la seconde mondiale. Je découvre très vite qu’il sait beaucoup de choses, qu’il connaît beaucoup de monde, qu’il rencontre beaucoup de monde et que beaucoup de monde lui rend visite. Il sait par coeur de très longs morceaux de la littérature française mais aussi des poésies, des chansons. Il est une véritable bibliothèque sonore à lui tout seul. Au fil des rencontres, je m’aperçois qu’il lit beaucoup et « de tout ». Des personnes lui prêtent des livres. Il fait partie de ces personnes qui toute leur vie cherchent à apprendre quelque chose de nouveau chaque fois qu’elles peuvent le faire. Ces sources d’informations ne sont pas la radio et la télé mais tout ce qui est écrit et tout ce qui lui est dit. J’ai assisté plusieurs fois à des rencontres où il était présent. Il posait beaucoup de questions aux autres pour apprendre d’eux ce qu’il ne savait pas. Ils étaient pour lui une forme de bibliothèque humaine.

 

Le 2 août 1991 les USA, à la tête d’une coalition de 35 pays, déclarent la guerre à Saddam Hussein soupçonné d’avoir des armes de dissuasion massive pour l'obliger à quitter le Koweit qu’il avait fait envahir par son armée. 

 

S’il y a eu, pendant la guerre du Viet-Nam, beaucoup de photos, de films, de reportages sur le terrain diffusés par les chaînes de télé du monde entier, cette fois-ci très peu d’images filtrent des combats humains. Les images sur les chaînes de télés ressemblent à celles des jeux vidéos de guerre. A en croire les médias, cette guerre n’est faite que de « frappes chirurgicales ». Une guerre à distance sans victimes humaines faite par missiles sol-sol et sol-air. La maîtrise de l’air semble être nettement du côté des USA et de leurs alliés. Rapidement le pays devient un champ de ruines. Rapidement une vérité s’impose: ce n’est pas l’Irak qui possède les armes de destruction massive. Cette guerre aurait-elle eu lieu si l’Irak avait eu la bombe atomique? Aurait-elle eu lieu si au lieu de champs pétrolifères il n’y avait eu que des champs de lentilles en Irak? Si Saddam Hussein n’avait pas envahi le Koweit? 

 

C’est alors qu’un soir, après la classe, je suis allé rendre visite à Aurélien M… chez lui. Il m’a fait entrer. Nous nous sommes assis près de la cheminée où une petite flambée était là pour nous tenir compagnie. Je lui ai fait par de mes états d’âme. Et voici ce qu’il m’a dit alors:

 

« Petit, notre père est mort quand nous étions gosses mon frère et moi. Nous avons aidé notre mère sur la propriété. En 1940 je suis mobilisé. Crois-moi, c’était dur pour moi de partir et de les laisser se débrouiller seuls. D’autant plus dur que nos chevaux ont été réquisitionnés. Cet été là et cet automne là, ma mère et mon jeune frère ont récolté ce qu’ils ont pu récolter à quatre mains. Le reste a pourri sur place. Alors tu vois si demain nous n’avons plus de pétrole et bien ça va être terrible pour tout le monde. Plus de tracteur pour faire les labours, plus de moissonneuses batteuses, plus de camions pour nourrir les villes. Il reste quelques chevaux de traits mais pas assez pour faire le travail des engins agricoles d’aujourd’hui. Travailler avec des boeufs? Il y en a presque plus et surtout il y a plus personne qui sait travailler avec. Alors, oui, s’il n’y a plus de pétrole, je ne peux pas imaginer que ça soit possible de faire sans. »

 

La guerre s’est poursuivie sur un rythme accéléré. Il y avait bien des manifs contre mais avec de moins en moins de monde à chaque fois. Les opérations militaires se sont poursuivies et l’Irak a été rapidement vaincu.

 

Une de ces opérations s’est appelée « Tempête du désert ». Je me souviens d’avoir pensé à l’époque: « Qui sème le vent récolte la tempête. Qui sème la tempête du désert récolte quoi? » A l’époque je ne savais pas quoi répondre. Aujourd’hui, nous le savons: « Qui sème la tempête du désert récolte Daesh. »

2 commentaires

#1  - jfs a dit :

Quand hier explique aujourd’hui.

En 1969, Pierre Nord, ancien "patron" des services secrets français a écrit dans son livre « L'actuelle guerre secrète »:


« (...) L'histoire moderne du Moyen-Orient est celle du pétrole et du canal de Suez. L'Iran possède 13% des réserves mondiales de pétrole. C'est pour cette marchandise qu'en 1953, en Iran, la C.I.A fit pour la première fois un roi - ou plutôt le refit - en remettant le Shah de Perse sur son trône. En 1953, le premier ministre iranien Mossadegh, patriote, émotif et imprudent, nationalisa les puits de pétrole. Les U.S.A lui coupèrent les vivres, ce qui l'accula à la faillite. A la fin du mois de Mai, l'aventureux Mossadegh fit du chantage en menaçant les Américains de s'allier aux Russes. La C.I.A prit l'affaire en main en envoyant à Téhéran son spécialiste sur l'Iran, sans oublier de lui ouvrir un compte illimité en dollars. Il s'appelle Schwartzkopf,( oui oui le même que celui de la première guerre du golf avec Bush père), un simple mais bon policier promu général subversif pendant la seconde guerre mondiale, et qui avait à ce titre pratiquement commandé, de 1942 à 1948, la police de l'Iran occupé par les Alliés. Schwartzkopf et ses dollars firent un coup d'état techniquement parfait. Schwartzkopf est un dur et la monnaie américaine est forte. Le 19 Août une manifestation populaire renversa Mossadegh. Depuis ce temps-là, le pétrole iranien coule d'Est en Ouest parallèlement et en sens inverse d'un courant de dollars. Les réserves mondiales de pétrole sont évaluées ainsi, en millions de barils et en pourcentage:


* Amérique du Nord: 42 000 (12,15%) dont 35 400 pour les U.S.A.
* Amérique Latine: 25 170 (7,13%) dont 17 250 pour le Venezuela.
* Europe: 35 250 (9,98%) dont 32 000 pour l'URSS.
* Extrême-Orient: 11 328 (3,21%) dont 9 500 pour l'Indonésie.
* Afrique: 23 049 (6,53%) dont 7 400 pour l'Algérie.
* Moyen-Orient: 215 360 (61%) dont 40 000 pour l'Iran, 60 000 pour l'Arabie Saoudite,
62 500 pour le Koweit. (…) »

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#2  - jfs a dit :

A propos de Pierre Nord


Pierre Nord, de son vrai nom André Brouillard, est un militaire et romancier français. Il est né en France en 1900 et mort à Monaco en 1985.

Son destin de spécialiste du renseignement se révèle très tôt. Sa ville étant occupée par les troupes allemandes de 1914 à 1918, il se livre à la collecte d'informations pour les alliés en observant les mouvements de trains allemands. Il est arrêté par l'occupant à Saint-Quentin en 1916. Condamné à mort, il est gracié en raison de son jeune âge et envoyé dans bataillon disciplinaire allemand.

La fin de la guerre lui permet de reprendre ses études. Élève à l'école spéciale militaire de Saint-Cyr de 1920 à 1922 , il entame une carrière d'officier des chars. Admis à l'École supérieure de guerre de 1932 à 1934 et diplômé de l'École libre des sciences politiques, il se distingue lors de la guerre du Rif au Maroc où il est blessé.

Il entre au Deuxième Bureau, le bureau de l’État-major des Armées chargé du recueil et de l'analyse du renseignement.

Il publie son premier roman en 1936 : "Double crime sur la ligne Maginot", un roman policier. Son deuxième ouvrage, "Terre d'angoisse" en 1937 est un vrai roman d'espionnage inspiré de ses souvenirs du premier conflit. Ses deux livres auront un grand succès et seront immédiatement adaptés au cinéma.

Pierre Nord devient ensuite chef des services spéciaux des 9e et 10e armées lorsqu'il est fait prisonnier par les troupes allemandes en 1940. Il s'évade et devient l’un des animateurs de l'Armée secrète. Après avoir appartenu au réseau de résistance Travaux ruraux, il sera, sous les ordres de son ami, le commandant Hubert de Lagarde, en 1943-1945, le second du réseau Éleuthère.

À la Libération, Pierre Nord quitte l'armée avec le grade de colonel pour se consacrer à la littérature.

En 1947-1949, il publie ses souvenirs de la deuxième guerre mondiale dans les trois tomes de "Mes camarades sont morts" qui reçoit le prix Vérité.

De nombreux romans (plus de 80) vont ensuite se succéder, ainsi que quelques essais et quelques récits pour enfants.

À partir de 1956, il devient directeur de deux collections publiées chez Fayard : "L’Aventure criminelle" et "L’Aventure de notre temps", cette dernière réservée à ses propres romans d’espionnage.

Plusieurs de ses livres ont été adaptés au cinéma dont "Le Serpent" (1973), de Henri Verneuil, d’après "Le 13e suicidé ».

(Source: site internet Babelio)

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