Petit mot d'Etty Hillesum

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Etty Hillesum est née en 1914 dans une famille juive hollandaise athée. Alors que sa famille, ses frères, elle-même n'étaient pas des juifs religieux, ne se sentaient pas vraiment juifs, alors que par trois  fois elle aurait pu quitter la Hollande - pour l'Angleterre, pour le Canada, pour l'Australie - au fur et à mesure des persécutions des "siens", elle va rejoindre dans des camps de transit celles et ceux qui vont partir vers la mort. Elle a décidé en conscience de les accompagner vers les chambres à gaz et les fours crématoires. Elle va alors se comporter  comme si elle n'allait jamais mourir. Elle va s'identifier au Christ. Ne pas tuer, ne pas faire tuer, témoigner par écrit, résister. Répondre au mal par le bien a été son choix de 1940 à 1943.

L'Histoire a retenu le nom d'Etty Hillesum et pas ceux de ses bourreaux.

Elle n'avait pas d'autres armes que son âme, une belle âme.

"La vie est une chose merveilleuse et grande, après la guerre nous aurons à construire une monde entièrement nouveau et, à chaque nouvelle exaction, à chaque nouvelle cruauté, nous devrons opposer un petit supplément d'amour et de bonté à conquérir sur nous-mêmes. Nous avons le droit de souffrir, mais non de succomber à la souffrance. Et si nous survivons à cette époque indemne de corps et d'âme, d'âme surtout, sans amertume, sans haine, nous aurons aussi notre mot à dire après la guerre. Je suis peut-être une femme ambitieuse: j'aimerais bien avoir un tout petit mot à dire." 

Etty Hillesum est décédée en 1943 à Auschwitz à l'âge de 29 ans.

Rencontre paysanne

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"L'Angélus" tableau peint par Jean-François Millet.

Nous avons rencontré dernièrement Yves Guibert, trésorier de l'association "Solidarité Paysans Aquitaine" Il apporte un accompagnement solidaire aux agriculteurs en difficultés. Nous lui avons posé les questions suivantes: 

 

Jean-François Sadys: Yves Guibert, bonjour, quelle est la situation actuelle du monde agricole français?

Yves Guibert: Bonjour, le nombre de fermes françaises est en baisse constante. Cent milles ont disparu en dix ans. Il n'y a pas de perspectives d’amélioration. La baisse devrait s’accentuer dans les prochaines années. Les terres libérées s’en vont très majoritairement à l’agrandissement des exploitations existantes au détriment de l’installation de nouveaux paysans.

Des fermes de plus en plus grandes cela ne veut pas dire amélioration des revenus pour beaucoup d’entre elles. De nombreuses causes expliquent cette situation.

Les aléas climatiques liés au réchauffement de la planète sont en augmentation. Des gels ravageurs ont lourdement impacté vignes et vergers, des grêles intenses ont détruit des cultures. La sécheresse et les températures caniculaires ont fait chuter les rendements.

Les crises sanitaires sont très présentes en Aquitaine: grippe aviaire avec abattage massif de volailles, tuberculose bovine, là encore avec abattage de troupeaux entiers.

Les crises économiques s'y ajoutent: la crise viticole, la surproduction se traduit par un effondrement des prix du tonneau pour qui arrive à vendre. Crise de croissance de l’agriculture biologique, la production augmente mais le marché est en baisse, 1/3 du lait et des œufs bio vendus à perte sur le marché conventionnel.

La guerre en Ukraine a provoqué une très forte augmentation du prix des fournitures (engrais, carburants, aliments du bétail). L’élevage est touché de plein fouet.

Les mécanismes d’aides calamités et des assurances existent mais les indemnisations partielles, les payements tardifs et le coût trop élevé des assurances n’arrivent pas à préserver les plus touchés.

JFS: Pourquoi "Solidarité Paysans" ?

Y.G: Des paysans ont fait le constat, il y a plus de vingt ans, des drames humains dans le monde agricole. De là est née l’idée d’un accompagnement solidaire par des paysans pour des paysans. Un réseau national s’est structuré. Quatre vingt salariés dont plusieurs juristes, un millier de bénévoles, accompagnent plus de trois milles familles paysannes en France. En Aquitaine, deux salariés et une vingtaine de bénévoles accompagnants actifs apportent leur aide à plus de 130 familles paysannes.

JFS: Quelle est l'éthique et mode d’intervention de "Solidarité Paysan"?

YG: Nous répondons à toute demande sans aucune considération d’appartenances syndicales, sans aucune considération d’opinions politiques, philosophiques ou religieuses. L’unique règle est que la demande soit formulée directement par les personnes concernées.Nos interventions sont totalement gratuites, avec garantie de confidentialité.Elles se font dans le respect des personnes et de leurs choix.L’accompagnement est systématiquement fait en tandem, un salarié et un bénévole, ou deux bénévoles. Les bénévoles sont essentiellement des agriculteurs retraités. Cet accompagnement de pair à pair permet d’établir un climat de confiance mutuelle. Il est fondamental et fait toute l’originalité de notre action.

JFS: De qui est reconnue "Solidarité Paysans"?

YG: L’association est reconnue auprès des tribunaux dans le cadre de l’accompagnement des procédures judiciaires et auprès des préfectures.  Nous réalisons des audits sur les fermes en difficultées. Nous sommes présents dans les structures intervenant autour du mal être agricole.L'association est reconnue d’intérêt général, nos donateurs privés bénéficient de 66 % de crédits d’impôts sur les dons, 60 % pour les entreprises. 

JFS: D'où proviennent vos financements?

YG: Nous ne demandons aucune participation aux accompagnés, souvent leur situation est si dégradée qu’ils n’ont plus le minimum vital. Il nous faut trouver des soutiens pour assurer la rémunération de nos salariés, l’indemnisation des frais kilométriques, la formation de nos équipes et un minimum de moyens et outils de communication.

Nous bénéficions de l’aide du Conseil Régional, des départements de la Gironde et de la Dordogne, des Mutualités Sociales Agricoles de Gironde, Dordogne et Lot-et-`Garonne , de l’agence régionale de santé (ARS), de trois collectivités locales dont la communauté d’agglomération d’Agen.

Cela ne suffit pas à couvrir nos charges et la tendance est à une baisse des soutiens publics, nous développons l’appel aux dons via la plateforme Helloasso :

https://www.helloasso.com/associations/solidarite-paysans-aquitaine

ou par chèque au siège de notre association :

"Solidarité Paysans Aquitaine"

 2 bis rue du 8 mai 1945

33540 Sauveterre de Guyenne.

Tous les dons bénéficient du crédit d’impôt.

Ces soutiens sont indispensables à la poursuite de notre action en faveur des plus démunis du monde agricole.

JFS: Quel bilan et quel avenir pour l'association dont vous êtes le trésorier ?

YG: "Solidarité Paysans Aquitaine" est récente en Lot et Garonne. Quinze familles sont suivies. Six bénévoles actifs interviennent sur le département et les départements limitrophes. On constate, depuis début 2022, une forte augmentation des appels Aquitains. Ils ont plus que doublé par rapport à la moyenne des dix dernières années. Les situations sont plus complexes, plus dégradées. Ils concernent tous types de productions et de tailles de ferme. Au-delà des aspects techniques et financiers, le plus important, c’est l’humain. Ce sont des familles en souffrance, on n’est jamais à l’abri du drame. Plus de trois cents suicides d'agriculteurs sont identifiés chaque année en France.

Nous sommes les seuls à intervenir totalement gratuitement mais surtout notre intervention prend d’abord en compte les personnes. Nous ne sommes pas là pour juger. Nous sommes d’abord là pour écouter, nouer le dialogue. Notre présence, en tant que bénévoles agriculteurs retraités ou actifs, facilite l’échange, la mise en confiance. Le seul fait de pouvoir exprimer ses problèmes peut aider chacun dans un couple à mieux comprendre l’autre, à lever des non dits. Éclaircir la situation c’est aller à la découverte de solutions.

Appelés assez tôt les espoirs de redressement sont importants. Appelés trop tard c’est beaucoup plus compliqué au plan économique mais il reste au moins la possibilité de préserver l’humain et l’aider à s’en sortir dignement.

C’est un engagement très motivant où la seule bonne volonté ne suffit pas, raison pour laquelle, nous mettons en place un important programme de formations.

Nous avons besoin de nouveaux bénévoles du monde agricole et pas seulement. Nous recherchons des personnes ayant une bonne maîtrise comptable, des aptitudes à nous aider en matière de communication.

N’hésitez pas à parler de nous, à nous faire connaître. Pour ceux qui seraient concernés, n’hésitez pas à nous appeler, mieux vaut trop tôt même s’il n’est jamais trop tard.

JFS: Merci d'avoir répondu à nos questions.

YG: Merci de nous les avoir posées. :-)

 

Propos recueillis par Jean-François Sadys

 

 

Pour joindre "Solidarité Paysans Aquitaine":

 

solidarite.paysans.aquitaine@orange.fr

 

Tel : 06 59 08 57 39 et 07 68 47 88 30

Résister, rester libre.

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Les paroles s'envolent, les écrits demeurent.

Nous avons assisté à l'assemblée régionale de l'ACAT France le samedi 12 et le dimanche 13 novembre 2022 au Centre Spirituel "La Solidude" à Martillac près de Bordeaux. Nous étions plus ou moins 80 venus du Lot-et-Garonne, de la Dordogne et de la Gironde. Il y avait un stand livres à consulter, à acheter. L'un d'entre eux a retenu mon attention. En voici ci-dessous une présentation. 

Résister, résister, résister c'est le fil conducteur de la plaidoirie de l'avocat Richard Malka au procès des assassins des journalistes de Charlie Hebdo. Et parce que les paroles s'envolent, il en a fait un livre de 93 pages pour que ce qui a été dit ce jour-là soit écrit pour toujours. Il a pour titre "Le droit d'emmerder Dieu" publié chez Grasset en 2021.

En voici des extraits:

"C'est à nous, et à nous seuls, qu'il revient de s'engager, de réfléchir, d'analyser et parfois de prendre des risques pour rester libres d'être ce que nous voulons. C'est à nous et à personne d'autre qu'il revient de trouver les mots, de les prononcer, de les écrire pour couvrir le son des couteaux sur nos gorges. (...)

A nous de dire, de dessiner, de jouir de nos libertés, de vivre la tête haute, face à des fanatiques qui voudraient nous imposer leur monde de névroses et de frustrations, en coproduction avec des universitaires gavés de communautarisme anglo-saxon et d'intellectuels, héritiers de ceux qui ont soutenu parmi les pires dictateurs du XX sème siècle, de Staline à Pol Pot.

C'est à  nous de nous battre, comme l'a dit Riss, pour rester libres. Nous et ceux qui nous succèderont. Voilà ce qui se joue aujourd'hui." (Pages 13/14)

"Clémenceau, à l'Assemblée, à l'évêque d'Angers invoquants les blessures des catholiques outragés; "Dieu se défendra bien lui-même, il n'a pas besoin pour cela de la Chambre des députés." C'est quasiment cette même formule qui sera reprise plus d'un siècle plus tard par le mufti de la mosquée de Marseille à propos des caricatures de Mahomet : "Un musulman qui croit que Dieu n'est pas assez grand pour se défendre tout seul est un musulman qui doute de la toute puissance divine et n'est pas un bon croyant." Ce n'est pas compliqué à comprendre. Dieu peut se défendre tout seul contre les pauvres mortels que nous sommes, ce n'est pas la peine de supprimer ses créatures." (Page 42)

Des dates marquantes:

2 novembre 2004: Assassinat de Theo van Gogh.

5 février 2006: Assassinat d'Andrea Santoro, prêtre italien en Turquie, en riposte à la publication des caricatures. 

2 novembre 2011: Incendie criminel des locaux de Charlie Hebdo.

7 janvier 2015: Attentat contre Charlie Hebdo. Douze morts, quatre blessés graves.

2 septembre 2020: Ouverture du procès des attentats de Charlie Hebdo  et de l'Hyper Cacher.

31 octobre 2020: Suspension du procès, trois accusés sont testés positif au Covid.

 2 décembre 2020: Reprise du procès.

4 décembre 2020: Plaidoirie pour Charlie Hebdo.

16 décembre 2020: le verdict est prononcé. Les quatorze personnes poursuivies ( dont trois absentes) sont condamnés à des peines allant de quatre ans de prisons à la réclusion à perpétuité. Deux ont fait appel.

Deux dates de l'Histoire de France à retenir:

En 1789 la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen sacralise la liberté d'expression ( et donc de caricaturer). En 1791 le délit de blasphème est supprimé du code pénal. 

Jean-François Sadys

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