"Le poète écrit: nous naissons comme le rocher, avec nos blessures. Y a-t-il d’autres chemins qui conduit alors à l’âge cassant? L’âge où, après avoir tenté de canaliser le tumulte de la vie brute, à grand renfort de systèmes et d’organisation – de dingues, en somme – , la part sauvage et anarchique de la vie reprend ses droits, et pousse d’autant plus fort que nous aurons cru la retenir avec autorité. Opposant à l’angoisse existentielle nos certitudes fanatiques, aux mouvements aléatoires nos fixations avides de contrôle, opposant aux balbutiements nos discours, aux danses des protocoles, à nos fièvres des remèdes, à nos pérégrinations la voix robotique des GPS, à notre vulnérabilité l’armée pathétique de toutes nos forces rassemblées. Nous cassons à la mesure même de notre rigidité, nous apprenons la fable du chêne et du roseau. La souplesse est notre seule chance, l’inclusion du tumulte, l’acceptation des limites de notre contrôle, la jachère de l’intranquillité qui offre à nos existences une parcelle désordonnée et féconde. Notre seule chance qu’il y pousse quelque chose que nous n’aurions pas imaginé. »
Marion Muller-Colard dans « L’intranquillité » chez Bayard « J’y crois », pages 13/14.
« Au berceau, déjà, l’inconfort, l’inquiétude, l’angoisse… L’intranquillité dans tous ses états. La vie, puissante, majestueuse, tranchante. La vie sans concession et sans demi-mesure. Aucun de nous n’aura fait l’expérience de naître à moité. Aucun de nous ne fera l’expérience de mourir à moitié. De bout en bout, la vie, entière et exclusive. Nous apprendrons à mettre de l’eau dans le vin, mais la vie, elle, restera tout ou rien. Nous en prendrons plein la vue, plein les poumons, plein le coeur. Car quelque chose nous saisit qui s’appelle exister – sortir de soi, être expulsé, séparé. On nous regarde, on nous dit tu, et il nous faudra une vie pour répondre je. Une vie pour admettre que nous avançons à découvert, qu’il n’y a pas d’autre peau que la sienne entre soi et le monde. »
Marion Muller-Colard, « L’intranquillité », Bayard « J’y crois », pages 12/13.
https://www.actes-sud.fr/catalogue/societe/petit-manuel-de-resistance-contemporaine
Que faire face à l’effondrement écologique qui se produit sous nos yeux ?
Dans ce petit livre incisif et pratique, l’auteur de Demain s’interroge sur la nature et sur l’ampleur de la réponse à apporter à cette question. Ne sommes-nous pas face à un bouleversement aussi considérable qu’une guerre mondiale ? Dès lors, n’est-il pas nécessaire d’entrer en résistance contre la logique à l’origine de cette destruction massive et frénétique de nos écosystèmes, comme d’autres sont entrés en résistance contre la barbarie nazie ? Mais résister contre qui ? Cette logique n’est-elle pas autant en nous qu’à l’extérieur de nous ? Résister devient alors un acte de transformation intérieure autant que d’engagement sociétal…
Avec cet ouvrage, Cyril Dion propose de nombreuses pistes d’actions : individuelles, collectives, politiques, mais, plus encore, nous invite à considérer la place des récits comme moteur principal de l’évolution des sociétés. Il nous enjoint de considérer chacune de nos initiatives comme le ferment d’une nouvelle histoire et de renouer avec notre élan vital. À mener une existence où chaque chose que nous faisons, depuis notre métier jusqu’aux tâches les plus quotidiennes, participe à construire le monde dans lequel nous voulons vivre. Un monde où notre épanouissement personnel ne se fait pas aux dépens des autres et de la nature, mais contribue à leur équilibre.
"Promenade autour d'Hoan Kiem" est un livre de Philippe Mary. Jean est le personnage fil conducteur de ce roman historique. Son père, Français de Normandie, perd dans un bombardement anglo-américain une partie importante de sa famille. Il se retrouve un peu perdu à la libération. Il erre un peu paumé dans un pays ravagé par 5 ans de guerre. Il finit par s'engager dans l'armée française. Il participe à la guerre d'Indochine. Et c'est dans ce pays qu'il rencontre une jeune femme. Ils se marient. Ils ont des enfants. La guerre d'Indochine terminée: retour en France. Jean y naît, y grandit, va à l'école. Très vite s'installe en lui un sentiment de différence avec les enfants de son âge. Il n'est pas tout à fait pareil. Il est très "eurasien". En dedans et au dehors, il y a en lui de la France et de l'Indochine. Le livre est donc une quête d'identité, un chemin de réconciliation avec les siens appartenant à deux mondes différents, deux cultures différentes. J'ai aimé dans ce livre les faits historiques rapportés par l'auteur, les descriptions des êtres humains emportés par les tourmentes de l'Histoire. Ce livre n'est pas un règlement de compte, il n'y a pas les bons et les méchants. Il y a des hommes et des femmes qui font face des deux côtés à des drames historiques. Ils choisissent la liberté de s'aimer malgré tout, de se sauver mutuellement. Jean sauve la vie d'une jeune femme qui plus tard sauve le jeune homme qui l'a sauvée. A eux deux, ils ne sombrent pas dans l'inhumanité des guerres. Ils sont emportés par la tourmente des événements qui leur échappent mais ils sauvent leurs âmes. Ils fabriquent de la vie, de l'espoir, de l'espérance. La vie l'emporte sur tout. Parce qu'ils ont choisi la liberté de s'aimer. Et ont su s'y tenir jusqu'à leur dernier souffle. Ce livre est bon pour le moral. Il nous invite à porter un autre regard sur le monde d'hier et d'aujourd'hui. A lire et faire lire sans modération.
Colibri Cx
Crise d'extinction: agir avant que tout s'effondre.
Aux cours des quarante-cinq dernières années, les populations d'animaux sauvages ont fondu de moitié. Des dauphins d'Extrême-Orient jusqu'aux moineaux de nos rues, la vie animale et végétale se retire à grande vitesse de notre globe terrestre dans un profond silence. Accoutumés aux environnements façonnés par la technique, nous oublions trop souvent qu'à la base de toute notre économie, de toutes nos productions, se trouvent les écosystèmes. Moins connue que le dérèglement climatique, la crise d'extinction biologique pourrait elle aussi ébranler toutes les sociétés humaines.
Face à ce défi, une responsabilité particulière incombe aux chrétiens. L'encyclique Laudato Si du pape François rappelle que le souci des créatures vivantes non humaines s'enracine dans les plus anciens récits de l'Ecriture. Il n'est pas en contradiction ou en compétition avec la défense de la vie humaine mais en relation avec elle. L'homme et "les petits oiseaux" survivront ensemble ou pas du tout.
Ne craignons pas d'être radicalement écologique et écologiquement radicaux! Ce livre revient aux origines de l'écologie et à la naissance de cette science. Il n'est pas seulement un appel vigoureux à la conversion. Il est aussi tout entier un poème et une ode à la Création.
Johannes Herrmann travaille pour l'association LPO-Agir pour la biodiversité. Mahaut Herrmann est journaliste spécialisé dans l'écologie à l'hebdomadaire La Vie. Ils sont tous les deux membres de la revue Limite.